Le 22 août 2010

Culture – Acculturation – Inculturation

Sur la voie du vivre ensemble

Notre société est multiculturelle. En Belgique comme dans la plupart des pays européens, c’est un fait, qu’il serait vain de nier et même de regretter, quelles que soient les difficultés rencontrées. Dès lors, la vraie question à se poser est celle du comment construire le vivre ensemble. Certains, parmi les « ressortissants indigènes de souche », seraient portés à exiger des « nouveaux venus » l’assimilation à la culture « dominante » considérée comme ayant droit d’aînesse… D’autres, parmi les « récents arrivés », seraient portés à exiger la reconnaissance intégrale de la culture d’origine qui a marqué leurs ascendants… Ces exigences sont-elles pertinentes, justes ? Ne seraient-elles pas plutôt illusoires et même pernicieuses ? Pour y voir plus clair, il est utile de réfléchir davantage à ce qu’est la culture et aussi à ce que l’on entend par acculturation et inculturation. Ceci dans la perspective de mieux nous situer sur la voie du vivre ensemble.

La culture, condition essentielle de notre développement personnel
 

Le mot culture (qui vient du verbe cultiver) recouvre des réalités bien différentes. Ainsi, comme nous le rappelle Le Grand Robert de la langue française, dans un premier registre relatif à la terre, nous désignerons par ce mot l’action de cultiver la terre, un végétal, ou la terre cultivée ou l’élevage des animaux, voire des microbes…. Dans un deuxième registre relatif à nos facultés intellectuelles, nous viserons le développement de celles-ci ou l’ensemble des connaissances acquises. Et l’on parlera de culture littéraire, philosophique, scientifique, artistique…, de culture générale. Voire aussi de culture physique pour désigner le développement de notre corps par des exercices appropriés. Dans un troisième registre qui concerne la vie en société, le mot « culture » recouvre une réalité complexe : le milieu humanisé dans lequel chaque être humain est plongé dès sa venue au monde.

Avant même que nous en prenions conscience, chacun de nous est en effet influencé, marqué par la famille dans laquelle il naît, par le milieu social où celle-ci s’insère, plus largement encore par les collectivités locales et beaucoup plus amples aux composantes multiples, en tel endroit de l’espace interconnecté avec d’autres lieux, en tel moment du temps, en lien avec l’histoire des générations antérieures… Ainsi chacun d’entre nous, qu’il le veuille ou non, est impliqué dans un ensemble, à la fois matériel et spirituel, aux composantes multiformes qui se compénètrent – ensemble que nous désignons par le mot culture : manières de vivre en société, coutumes et lois, organisations politiques et sociales, techniques, sciences (dites humaines ou exactes), littérature, beaux-arts, musique, conceptions du monde et de la vie (philosophies, religions)… De l’individuel nous sommes renvoyés au collectif, de la personne à la société…[1]
 

« La culture, c’est tout l’environnement humanisé par un groupe, c’est sa façon de comprendre le monde, de percevoir l’homme et son destin, de travailler, de se divertir, de s’exprimer par les arts, de transformer la nature par des techniques et des inventions. La culture, c’est le produit du génie de l’homme, entendu au sens le plus large, c’est la matrice psycho-sociale que se crée, consciemment ou inconsciemment, une collectivité : c’est son cadre d’interprétation de la vie et de l’univers ; c’est sa représentation propre du passé et son projet d’avenir, ses institutions et ses créations typiques, ses habitudes et ses croyances, ses attitudes et ses comportements caractéristiques, sa manière originale de communiquer, de produire et d’échanger des biens, de célébrer, de créer des œuvres révélatrices de son âme et de ses valeurs ultimes. La culture, c’est la mentalité typique qu’acquiert tout individu s’identifiant à une collectivité, c’est le patrimoine humain transmis de génération en génération. Toute communauté jouissant d’une certaine permanence possède une culture propre : une nation, une région, une tribu, une catégorie sociale définie, comme les jeunes, les travailleurs. La culture désigne leur manière caractéristique de se comporter, de penser, de juger, de se percevoir et de percevoir les autres : chaque groupe a ses attitudes, ses échelles de valeurs, son profil culturel ». 

Hervé Carrier, Lexique de la culture pour l’analyse culturelle et l’inculturation, Paris, Desclée, 1992, pp. 101-102.
 

Pour chacun d’entre nous, naître dans une culture particulière – celle de telle communauté humaine – est un fait et un fait positif. En effet, même si elle a des limites et des défauts, cette culture est indispensable pour que je me développe comme personne : avec ses diverses composantes qui viennent d’être évoquées, elle me donne un cadre de vie, elle me nourrit, elle me permet de ne pas être isolé, d’être en lien avec un groupe (ne fut-ce que par la langue qui m’est donnée).

Protection, support, cette culture particulière est même essentielle pour que je devienne autonome… En même temps, je ne deviens un être humain libre que si je me situe personnellement à son égard – comme à l’égard des parents, comme par rapport à la nature (et même, faudrait il ajouter, comme par rapport à Dieu). En quelque sorte, chacun est appelé à constituer sa propre culture (sa personnalité), de façon plus ou moins originale, en se référant avec esprit critique à la culture qui a nourri son enfance, ainsi qu’aux autres cultures qu’il est amené à rencontrer. Il s’agit, c’est l’exigeant travail de l’esprit critique, d’y discerner ce qui apparaît fondamental pour la vie personnelle comme pour le vivre ensemble[2], de situer à leurs justes places les éléments seconds en reconnaissant leur caractère relatif, sans les absolutiser[3], de récuser des idées ou des comportements qui portent atteinte à la dignité de l’être humain ou au vivre en paix sociétal, même s’ils sont fortement enracinés dans ma culture[4], Ce faisant, je construis ma propre histoire – chaque vie humaine est histoire – et je contribue à l’histoire de la communauté humaine dont je fais partie.

Il en résulte que chacun a droit à la culture et a, tout à la fois, le devoir d’oeuvrer à son essor de manière à ce que tous en bénéficient pour leur propre épanouissement humain.
 

Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles, Conférence mondiale sur les politiques culturelles, UNESCO, Mexico City (26 juillet – 6 août 1982)

« La Conférence convient que, dans son sens le plus large, la culture peut aujourd’hui être considérée comme l’ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l’être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances »

« La culture donne à l’homme la capacité de réflexion sur lui-même. C’est elle qui fait de nous des êtres spécifiquement humains, rationnels, critiques et éthiquement engagés. C’est par elle que nous discernons des valeurs et effectuons des choix. C’est par elle que l’homme s’exprime, prend conscience de lui-même, se reconnaît comme un projet inachevé, remet en question ses propres réalisations, recherche inlassablement de nouvelles significations et crée des oeuvres qui le transcendent » (Préambule)..

La Déclaration de Mexico a été approuvée à l’unanimité des 130 gouvernements présents à la Conférence mondiale sur les politiques culturelles. C’est dire son importance et son intérêt : elle a été officiellement établie par un grand nombre de gouvernements, et cela dans une perspective politique éthique ayant une portée planétaire : en tenant cette conférence, « la communauté internationale a décidé de contribuer effectivement au rapprochement des peuples et à une meilleure compréhension entre les hommes » (Préambule).

Disponible sur le site : http://portal.unesco.org/culture/fr/files/12762/11295422481mexico_fr.pdf/mexico_fr.pdf

La culture, au fondement du développement des peuples et du vivre ensemble planétaire
 

C’est que la culture n’est pas seulement indispensable au développement personnel de l’individu. Elle joue un rôle fondamental dans l’évolution des groupes sociaux, des plus petits aux plus grands. C’est en puisant dans ses racines culturelles, en préservant son patrimoine culturel aux aspects multiples, qu’un peuple peut donner consistance à ce qu’il est – aidant ainsi ses membres à se développer personnellement et favorisant le vivre ensemble sociétal.

En outre, avec sa culture, il donne corps à sa présence dans le monde – faisant ainsi connaître ce qu’il est avec les valeurs qu’il véhicule, les œuvres propres qui enrichissent la vie humaine, et se faisant ainsi reconnaître et respecter par les autres peuples ou groupes sociaux[5].

Enfin, en manifestant sa culture à l’ensemble du monde, un pays, un groupe humain peut offrir en partage ce qui le fait vivre, contribuant ainsi, dans la rencontre des autres cultures, à des découvertes qui  inspireront – on peut l’espérer – de nouvelles créations, de nouvelles manières de vivre…[6]

La diversité culturelle est richesse. Elle est essentielle au devenir de l’humanité, il importe de le reconnaître. Tout comme nous en sommes arrivés à reconnaître que la biodiversité est essentielle à la vie sur notre planète. Il faudrait ici s’interroger sur les dommages considérables que provoque un certain type de mondialisation économique – en phase avec la pensée unique d’un ultra-capitalisme – qui insidieusement, avec l’appui d’une publicité qui va jusqu’à s’apparenter au lavage de cerveau, uniformise manières de produire, de consommer, de vivre, de parler, de penser… Ceci pouvant aboutir au laminage de groupes culturels en position de faiblesse par rapport à des puissances hégémoniques, économiques et autres. Avec pour résultat une disparition de langues, un abâtardissement de coutumes, une dégradation de la création culturelle, bref un appauvrissement humain… Sans doute ne faut-il pas noircir le tableau, mais il y a matière à réflexion sérieuse. 
 

Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles, Conférence mondiale sur les politiques culturelles, UNESCO, Mexico City (26 juillet – 6 août 1982)

« Toutes les cultures font partie du patrimoine commun de l’humanité. L’identité culturelle d’un peuple se renouvelle et s’enrichit au contact des traditions et des valeurs des autres peuples. La culture est dialogue, échange d’idées et d’expériences, appréciation d’autres valeurs et traditions ; dans l’isolement, elle s’épuise et meurt » (art. 4).

« Loin d’entraver la communion dans les valeurs universelles qui unissent les peuples, les particularités culturelles la favorisent. La reconnaissance du fait que des identités culturelles multiples se côtoient là où coexistent des traditions différentes constitue donc l’essence même du pluralisme culturel » (art. 6).

Au contraire, « L’humanité s’appauvrit lorsque la culture d’un groupe déterminé est méconnue ou détruite » (art. 8).

Disponible sur le site : http://portal.unesco.org/culture/fr/files/12762/11295422481mexico_fr.pdf/mexico_fr.pdf
 

C’est ainsi que le développement économique, dans la perspective d’un développement humain intégral, ne peut s’opérer réellement que s’il « prend en compte le contexte historique, social et culturel de chaque société », comme le dit très bien la Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles (1982)[7]. Les entreprises devraient mettre cette préoccupation essentielle dans leurs stratégies. On sait que c’est trop rarement le cas et que même les Gouvernements, pourtant responsables du bien commun, contreviennent dans bien des cas au respect de ce devoir essentiel. Il faudrait rappeler ici la « Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones » (2007)[8] ainsi que la « Convention relative aux peuples indigènes et tribaux » (C169), adoptée par la Conférence générale de l’Organisation internationale du Travail (OIT) le 27 juin 1989[9], qui restent souvent lettre morte[10].

C’est ainsi également que la culture doit faire corps avec la démocratie. « La culture émane de la communauté toute entière et c’est à elle que tout doit retourner », affirme la Déclaration de Mexico, en précisant « Ni sa production, ni ses bienfaits ne sauraient être l’apanage d’élites. La démocratie culturelle repose sur la participation la plus large de l’individu et de la société au processus de la création de biens culturels et aux décisions qui concernent la vie culturelle, de même qu’à la diffusion et à la jouissance de la culture »[11].

La rencontre des cultures. De l’acculturation à l’inculturation
 

Les groupes humains ne restent pas isolés. De tous temps, et plus encore aujourd’hui à l’ère de la mondialisation, des individus ou des familles voyagent ou migrent d’un pays à l’autre, proche ou lointain, de façon temporaire ou durable… Venant tous avec leur culture. Ainsi, des groupes humains, parfois importants, sont amenés à en côtoyer d’autres. Des influences culturelles vont immanquablement se manifester et des changements culturels se produire.

Des anthropologues vont parler d’acculturation pour désigner ce processus par lequel un groupe humain s’adapterait à un autre, assimilerait certaines de ses valeurs culturelles. C’est ce qui se passe avec les paysans qui s’installent dans les villes, les citadins qui migrent à la campagne, et bien sûr les populations d’origine étrangère… Tous se trouvent confrontés à une nouvelle culture qu’il leur faut découvrir, comprendre. Face à des groupes majoritaires, il s’agit d’être accepté, d’adopter des comportements nouveaux, voire des idées nouvelles… Après un certain temps (le temps d’une ou plusieurs générations), certains iront peut-être jusqu’à oublier leur langue d’origine et à « s’assimiler ». Mais le plus souvent l’attachement à certains aspects de la culture d’origine restera réel, reprenant même vigueur – que ce réveil soit ou non corrélatif de la manière dont les populations dites autochtones reconnaissent ou non les nouveaux arrivants… Des mélanges se produiront – l’acculturation n’allant pas dans un seul sens… Non sans tensions sans doute… Beaucoup d’études ont été menées sur les situations diverses et complexes du terrain. Mais ce qu’il convient de reconnaître dans une perspective éthique, c’est que l’assimilation pure et simple peut être nocive, en méconnaissant, étouffant ou niant des valeurs authentiques, et avoir des effets néfastes, en appauvrissant l’humanité[12]. L’acculturation ne peut se faire n’importe comment !

Ce qui vient d’être souligné met en évidence les responsabilités importantes et graves des « accueillants » (citoyens lambda comme autorités publiques) à l’égard des « accueillis ».

Mais, sur le plan éthique toujours, des responsabilités incombent tout autant aux « accueillis » : si leur propre culture doit être reconnue et respectée, eux aussi ont à découvrir, reconnaître, respecter la culture des habitants et groupes parmi lesquels ils vivent. On pourrait parler ici d’une démarche d’inculturation. Nous insérer dans une société autre que celle d’origine, nous faire connaître et reconnaître avec nos richesses humaines et culturelles, entrer en relation, voire aussi – ce qui est légitime – partager les valeurs qui nous paraissent essentielles, tout cela requiert  de prendre les gens et groupes que nous rencontrons tels qu’ils sont et leurs cultures telles qu’elles sont.

Ce qui s’est passé dans l’histoire avec les « missionnaires »  chrétiens, animés par le souci de partager la bonne nouvelle (« l’évangile ») qui les faisait vivre, peut donner à penser. Certains d’entre eux se sont imaginé bien faire en imposant leurs conceptions de vie, leurs manières de faire, condamnant comme inférieures voire néfastes  des coutumes dont ils ne prenaient pas la peine de chercher à découvrir le sens et la valeur… Bref, adoptant une voie d’ « impérialisme culturel », qui contredit en fait la façon de faire (celle de l’incarnation) de ce Jésus dont ils se disaient disciples… Avec les effets destructeurs, parfois graves, que cet impérialisme culturel entraîne. D’autres, au contraire, en prenant au sérieux la voie de l’incarnation, approchaient avec respect les cultures des populations qu’ils découvraient, adoptant autant que possible leurs langages et coutumes pour se faire comprendre, décelant les valeurs véritables dont elles sont riches, allant jusqu’à y percevoir à l’œuvre l’Esprit de Dieu[13]. Cette deuxième voie est celle d’une inculturation véritable.
 

Directive de la Congrégation pour la Propagation de la Foi – 1659

« Ne mettez aucun zèle, n’avancez aucun argument pour convaincre ces peuples de changer leurs rites, leurs coutumes et leurs mœurs, à moins que ceux-ci ne soient évidemment contraires à la religion et à la morale. Quoi de plus absurde que de transporter, chez les Chinois, la France, l’Espagne, l’Italie ou quelque autre pays d’Europe ?  N’introduisez pas chez eux nos pays, mais la foi, cette foi qui ne repousse ni ne blesse les rites ni les usages d’aucun peuple, pourvu qu’ils ne soient pas détestables, mais bien au contraire veut qu’on les garde et les protège. »

Cité dans Hervé Carrier, op. cit., p. 197.

Décret sur l’activité missionnaire de l’Église « Ad Gentes » (Vatican II, 1965)

« L’Église, afin de pouvoir présenter à tous le mystère du salut et de la vie apportée par Dieu, doit s’insérer dans tous ces groupes humains du même mouvement dont le Christ lui-même, par son incarnation, s’est lié aux conditions sociales et culturelles déterminées des hommes avec lesquels il a vécu. » (n° 10)

« Tous les chrétiens (…) doivent (…) se reconnaître comme des membres du groupement humain dans lequel ils vivent, avoir une part active dans la vie culturelle et sociale au moyen des divers échanges et des diverses affaires humaines ; ils doivent être familiers avec leurs traditions nationales et religieuses, découvrir avec joie et respect les semences du Verbe qui s’y trouvent cachées… » (n°  11)
 

L’importance de l’inculturation dépasse le cas des chrétiens. Que l’on soit ou non chrétien, que l’on soit athée ou religieux, il nous apparaît que, dès que des individus ou des groupes côtoient d’autres groupes ou individus, ils ont à entrer dans une démarche d’inculturation…

Des orientations à traduire en décisions politiques. Une exigence éthique
 

De telles réflexions risquent de paraître « théoriques », « abstraites ». Il importe de les développer de façon concrète, en tenant compte des situations dans lesquelles nous nous trouvons. Des « réalistes » pourraient les traiter de « douces rêveries »…En réalité, elles nous paraissent constituer des orientations solides à traduire en décisions politiques[14]. En veillant d’ailleurs à bien situer le développement de l’identité culturelle, puisque qu’on sait que les identités peuvent être « meurtrières »[15].

Il en est ainsi de tout groupe social et de tout peuple (comme de toute personne humaine) : ne vivant pas en vase clos, il ne peut développer sa propre identité – selon une perspective éthique – que s’il reconnaît et respecte celle des autres. Ne pas le faire reviendrait à conseiller aux autres cette aberration : « ne reconnaissez pas, ne respectez pas ce que nous sommes, puisque nous sommes différents de vous » !!!

On en revient à ce travail indispensable et exigeant, qui a été évoqué plus haut à propos du développement de la personnalité – mais qu’il s’agit cette fois de mettre en œuvre sur un plan collectif : en présence des autres cultures comme de la nôtre, ensemble discerner ce qui est fondamental, situer à leurs justes places les éléments seconds en reconnaissant leur caractère relatif sans les absolutiser, récuser des idées ou des coutumes qui portent atteinte à la dignité des êtres humains ou au vivre en paix mondial, même si elles sont fortement enracinées dans notre culture… Tout un travail de respect réciproque et d’empathie. Un travail de longue haleine, alliant intelligence, patience, détermination. Travail difficile sans doute mais indispensable si nous voulons construire le vivre ensemble d’une société démocratique.

Notes :

  • [1] Certains parleront de sous-cultures pour désigner des ensembles appartenant à un ensemble plus vaste. Pour la présente réflexion, ces distinctions ne nous paraissent pas indispensables. Néanmoins elles rappellent que, dans une société globale, des sous-groupes peuvent avoir des traits culturels spécifiques qui les distinguent d’autres sous-groupes, alors que, dans cette société globale, ils ont pourtant des points communs tout aussi importants à reconnaître que la diversité…

    [2] Ainsi des valeurs aussi essentielles que le respect, la solidarité…

    [3] Pensons aux manières très diverses d’exprimer le respect selon les lieux ou les époques… Tel geste – se serrer la main – pourra apparaître irrespectueux en certains cas, ou au contraire signe d’estime…

    [4] Telles les coutumes portant atteinte à l’intégrité physique de la femme, telles les idées de supériorité raciale, de classe, de peuple dont les effets peuvent être abominables

    [5] Songeons, par exemple, aux sculptures africaines qui témoignent du savoir-faire et du savoir-être des peuples subsahariens. Nombre d’artistes européens, tels Picasso, Matisse et bien d’autres, y ont trouvé inspiration.

    [6] Les peuples indigènes d’Amérique du Sud ne donnent-ils pas à penser sur le respect de la terre, nous incitant à repenser les liens qui nous unissent à elle ?

    [7] Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles, Conférence mondiale sur les politiques culturelles, UNESCO, Mexico City (26 juillet – 6 août 1982), art. 16. Les articles 10 à 16 de la Déclaration portent sur la dimension culturelle du développement. Ils méritent attention. Disponibles sur le site : (http://portal.unesco.org/culture/fr/files/12762/11295422481mexico_fr.pdf/mexico_fr.pdf).

    [8] Résolution adoptée par l’Assemblée générale le 13.09.2007, http://www.un.org/esa/socdev/unpfii/fr/drip.html.

    [10] Lire, par exemple, Amazonie péruvienne : le pétrole et le sang ou la sève et les hommes ?, Centre Avec, septembre 2009 (http://www.centreavec.be/pages/Pub_analyses_amazonie%20p%E9ruvienne.htm).

    [11] Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles, op. cit., art 18 (les articles 17 à 18 traitent de « Culture et démocratie »).

    [12] Comme, par exemple et ce n’est qu’un exemple, dans le cas des Indiens d’Amérique du Nord…

    [13] Ces tendances ont conduit à des débats et tensions que l’on retrouve tout au long de l’histoire du christianisme, depuis les échanges houleux de l’assemblée de Jérusalem (vers 48-49) jusqu’à nos jours (ainsi au Concile Vatican II, 1962-65), en passant par la querelle des rites (chinois) aux XVIe-XVIIe s. La deuxième tendance s’est assez bien exprimée dans le décret Ad Gentes de Vatican II. Aujourd’hui, la façon dont les catholiques vivant en Algérie conçoivent leur mode de présence va tout à fait dans ce sens, comme en témoigne Claude Rault, évêque du Sahara algérien (Désert, ma cathédrale, Desclée De Brouwer, 2008 ; http://www.justicepaix.be/?article308).

    [14] Signalons comme allant dans un sens positif, même si elles en restent à un niveau modeste, les actions de soutien au dialogue interculturel menées par certaines autorités communales.

    [15] Amin Maalouf, Les identités meurtrières, Grasset, 1998 (Livre de Poche, 2001).