En Question n°152 - mars 2025

Il vient le « monde d’après » ? Lentement…

En pleine pandémie de covid, le Cefoc a lancé un processus de formation autour de la question : « c’est quoi une vie normale ? ». Ce processus prenait appui à la fois sur le slogan dominant de l’époque : « on veut un retour à une vie normale » et sur des voix nombreuses qui disaient : « on ne veut pas un retour à ce qui nous semble anormal ». Pas de retour à ce « monde d’avant », où la vitesse et la croissance détruisent les vivants, les écosystèmes, la santé, les relations… Un espoir habitait ce moment douloureux : l’espoir que la pandémie ouvre les yeux et permette d’habiter un monde plus juste et plus solidaire. Le slogan « prenez soin de vous et des autres », de la terre et des vivants, la mise en valeur de métiers essentiels, apparaissaient comme une nouvelle boussole.

crédit : Markus Spike – Unsplash

Cinq ans après, le constat est amer : on n’a pas basculé dans un « monde d’après » plus humain. Au contraire, la logique qui mène à de nouvelles catastrophes humaines et environnementales, semble s’être accélérée. Des mesures inspirées par un culte de la performance, toujours bien présent, sont mises en avant un peu partout. Les objectifs de croissance et de compétitivité sont martelés.

Paradoxalement, espérer un changement radical et rapide, vouloir voir ce « monde d’après », n’était-ce pas aussi céder aux sirènes de la performance ? Le retour du balancier vers la consommation, la croissance… n’était-il pas inévitable ? Le passage par la rue et les conflits ne fait-il pas partie du chemin vers la robustesse ?

Durant le confinement, pour nos formations, nous avons accepté la lenteur, les essais et erreurs, testé de nouvelles modalités de rencontres, renoncé à certains de nos objectifs ; avec comme boussole le prendre soin, le tissage de liens et la visée d’un monde plus juste, dans lequel chacun.e a une place égale. Cette période nous a révélé des façons de faire, robustes plutôt que performantes. Peut-être alors, pouvons-nous simplement poursuivre notre marche lente sur des chemins de traverse, d’hésitation. Restons proches et solidaires de ceux et celles qui continueront à payer cher le tribut de la performance, ouvrons des espaces de dialogue et de délibération, des espaces où chacun.e est reconnu.e à part égale, et ensemble continuons à tracer de nouvelles pistes…